La Recette d'une bonne relation : Un Quatre-Quarts

Pour qu’une relation soit équilibrée, dans l’idéal il faudrait 25% de recevoir, 25 % de donner, 25 % de demander et 25 % de refuser.

* Le premier quart, c’est la capacité à recevoir. C’est pouvoir de se nourrir de tout le beau et le bon qui va venir de l’autre. A chaque fois que je suis capable d’accueillir une parole, un geste, un regard gentil ou une aide qu’on me propose, la vie, l’énergie et l’estime de soi grandissent. Mais accueillir ce qui fait du bien, ce n’est pas inné pour tous. Je suis responsable de mon côté de relation et personne d’autre que moi ne pourra ouvrir son cœur à ma place. Au début d’un deuil on ne peut pas ; aller en confiance, s’ouvrir sur le monde, c’est accueillir ces petites pépites qui arrivent petit à petit.

C'est difficile de dire "Oh merci ça me fait plaisir !". On a parfois de la difficulté à dépendre de l’autre. Or nous sommes des êtres interdépendants, c’est ça qui fait notre beauté. Nous avons besoin les uns des autres. C’est la beauté de notre humanité.

* Il va falloir que j’apprenne aussi à donner. Et donner n’est pas si simple qu’il n’y parait. Le vrai don n’attend rien en retour, il ne met pas l’autre en dépendance. Il ne s'agit pas de : "Je te donne quelque chose et j’attends un retour". Ou bien "Je te fais un compliment parce que j’aimerais que tu me renvoies le compliment." Le vrai don, c'est : je suis responsable de ce que j’envoie, et ensuite c’est l’autre qui est responsable de ce qu’il en fait. Nous sommes créés pour cette interdépendance, et nous trouvons notre joie en donnant.

Mais pour autant le don peut ne pas être ajusté. Avant de donner, je dois me poser trois questions : Est-ce qu’on a sonné ? Est-ce que je suis compétent ? Est-ce que j’en ai vraiment envie ? Il arrive que je donne tellement maladroitement ou malgré moi, que je blesse l'autre personne par mon don.

* Le troisième quart est savoir demander. Oser demander réveille notre "non toute-puissance". Etre ajusté dans ses relations, c’est réaliser que nous sommes des êtres uniques, irremplaçables et que j’ai en face de moi des libertés que dois respecter. Souvent derrière les demandes il y a des exigences cachées. La vraie demande laisse l’autre libre de sa réponse, avec le risque que ça soit oui ou non. Souvent je vais prendre le non de la personne contre moi, comme si j’étais remis en cause dans ma valeur. Mais ce n’est pas à moi que l’autre dit non, c’est à ma demande. Par peur de la réponse, nous n’osons parfois pas demander.

Il faut une formulation claire : "J’ai envie d’un bouquet pour ma fête, d’un repas avec mes enfants le jour anniversaire de la mort de mon conjoint". Quelquefois j'attends qu’on devine ; mais les autres ne sont pas moi, ils ne sont pas dans ma tête : vais-je le leur reprocher ? Donnons aux autres notre mode d’emploi !

* Je termine par oser refuser. Dans un lien avec quelqu'un, lorsqu’une demande m'est adressée, je peux dire non. Quand je dis non, je prends le risque de me positionner et de déplaire. Or ce n’est pas contre elle que je dis non, c’est sa demande que je refuse.

Me reposer les questions : Est-ce qu’on m’a sonnée ? Est-ce que je suis compétente ? Est-ce que j’ai vraiment envie ? Si je suis trop dans l’incapacité de dire non, je ferai des choses avec lesquelles je ne suis pas d’accord. Alors naîtront en moi une colère, une frustration, l'impression que les gens m’utilisent, et c’est insupportable. Etre capable de respecter l'autre pour ce qu’il est, ne pas l’utiliser et savoir refuser, c'est la chasteté : "J'ajuste ma distance par rapport à l’autre". C’est valable dans les relations amicales, entre parents et enfants, avec les collègues, etc. C'est difficile pour certains et on a toute une vie pour apprendre. Le premier non donne confiance en soi. Tout cela augmente la vie, l’énergie et l’estime de soi.

Parce que je suis la personne la plus importante au monde, personne d’autre que moi ne pourra vivre ma vie à ma place. Je ne peux pas être responsable de ce qui se passe du côté de l'autre personne mais au moins je suis responsable de ce qui se passe de mon côté. Tout l’enjeu est d’arriver à dynamiser mes relations en équilibrant les 25 %, pour donner, demander, refuser et recevoir. En prendre conscience permet d'entrer dans une qualité relationnelle avec l’entourage qui fait qu’on a l’impression justifiée de redevenir co-auteur de sa vie et de ne plus subir. C’est le jour où je ne subis pas que je choisis ma vie ; alors je peux commencer à grandir.

Nolwenn Porcheret. Extrait de la conférence Vivre la transformation des liens. Lourdes 2016